« Constellation Capricone » ou l’Écomusée du Véron en étoile montante de la culture près des musées parisiens

C’est sur une route bien connue par les cyclistes de la Loire à Vélo que se cache un écrin encore trop méconnu. En plein territoire bocager, au cœur de la Touraine et entre les bras bienveillants de la Vienne et de la Loire, se situe l’Écomusée du Véron. Loin du modèle de l’Écomusée d’Alsace qui est un peu le Skansen français, cet ancien corps de ferme de pierre de tuffeau et d’ardoise abrite des trésors insoupçonnés. Qui pourrait se douter, en pédalant sur la route et en croisant cette institution, que derrière ses portes se trouvent des Pablo Picasso, du Max Ernst, du Brassaï, du Paul Klee ? Mais attention, le contemporain n’est pas le seul invité des vitrines. Des antiquités gréco-romaines, des œuvres africaines et d’Indiens d’Amérique, des objets de la Préhistoire et de l’Océanie se donnent aussi rendez-vous dans ce cadre hors du commun.

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© CCCVL

Depuis le 6 avril 2019, l’Écomusée du Véron accueille dans sa superbe exposition « Constellation Capricorne » ces étoiles d’art. Comment un musée de province, presque perdu dans la campagne et en-dehors du si célèbre itinéraire des Châteaux de la Loire, peut-il regorger de telles surprises ? Il faut remonter un peu dans le calendrier…  Un an avant le début de l’exposition, au printemps 2018, l’ancienne Ministre de la Culture François Nyssen, lance l’opération « Culture Près de Chez Vous ». Véritable pari entre les petites institutions de France et les gros géants parisiens, ce projet ministériel vise à mieux faire circuler les œuvres sur le territoire afin de redynamiser la culture en province et briser le triste constat que la grande majorité des œuvres majeures se trouve dans la capitale.

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© Laureen Gressé-Denois

Ode poétique qui laisse le visiteur déambuler dans ses émotions, ses pensées et ses visions, « Constellation Capricorne » part de la sculpture monumentale Capricorne de Max Ernst pour emmener ses invités dans des pérégrinations aussi bien temporelles que géographiques, le parcours couvrant la Préhistoire jusqu’à de nos jours avec des œuvres venues de tous les continents. Le choix de ce bronze gigantesque de l’artiste dadaïste de Brühl est évident puisqu’en revenant des États-Unis où il laisse son original en plâtre à Sedona, il en fait faire des exemplaires en bronze qu’il a retravaillé, notamment à Huismes, commune toute proche de l’Écomusée, où il s’installe. Des films de l’époque montrent par ailleurs la présence de ce couple royal énigmatique dans son atelier. Capricorne regorge de secrets uniques. Si l’assemblage de ces êtres hybrides semble au premier abord bien étonnant et fortuit, dans la veine surréaliste de l’artiste, une seconde lecture tout à fait réfléchie et sans doute sciemment déterminée par l’artiste peut être déterminée. Celle-ci n’est possible que si l’on connaît déjà de nombreuses choses en Histoire de l’Art : reconnaître les idoles violons des Cyclades dans le buste de la Reine, la figure du Minotaure pour le Roi, la stature hiératique du couple qui fait éminemment penser aux représentations de couple pharaonique de l’Égypte ancienne, le chien gargouille symbole de fidélité amoureuse au Moyen Âge. Max Ernst propose plusieurs niveaux de découverte et de plaisir face à son œuvre que l’on savoure autant en simple amateur qu’en connaisseur. La prouesse réside aussi dans ces formes, trouvées en premier lieu en moulant des objets du quotidien dans le plâtre.

À l’aide de nombreuses citations philosophiques ou poétiques le visiteur n’a pas besoin d’être un grand éclairé de l’art pour comprendre et ressentir cette exposition adapté à tous les âges. Le thème de l’hybridation homme-animal, qui sous-tend toute l’exposition au-delà du Capricorne qui est le prétexte pour mettre en orbite d’autres œuvres semblables, soulève des questions sur nos conceptions de la spiritualité, de l’insondable, des forces de la nature en tant qu’adulte. Toutefois, l’enfant y trouve aussi son bonheur en s’extasiant devant ces êtres surnaturels qui lui rappellent ceux des contes avant d’aller au lit : les sirènes mi- femme mi-poisson, les sphinx mi-homme mi-lion, les centaures mi-homme mi-cheval… jusqu’à leurs super-héros préférés (Spiderman ne tient-il pas son pouvoir d’une araignée et Batman d’une chauve-souris) ?

Même si l’exposition ne s’étend que sur trois salles, elle présente des bijoux du centre Pompidou, du musée Pablo Picasso, du musée national de la Préhistoire de Saint-Germain-en-Laye et de très belles pièces de musées régionaux. Elle n’a absolument pas à rougir devant les expositions parisiennes. Dans une ambiance musicale douce, de belles vitrines toutes neuves qui pourront resservir pour de futures expositions, un éclairage tamisé et de grands panneaux aérés qui ne sont pas saturés d’informations mais qui au contraire, éveillent et nourrissent l’inspiration propre et la méditation du visiteur, « Constellation Capricorne » réunit tous les ingrédients pour plaire ! On ne peut que souhaiter longue vie et prospérité croissante à cet Écomusée qui se rapproche de l’intime et de l’universel de leur territoire plus que jamais. Elle est une telle réussite que même l’actuel ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer s’y est spécialement rendu pour la Nuit des Musées 2019.

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© Marie Turpin

Pour les vacances de Toussaint, si vous partez faire un tour le long de la Loire, ne manquez pas cette superbe exposition qui fait honneur aux collections parisiennes dans notre si belle campagne française jusqu’au 11 novembre 2019 !

 

Laureen Gressé-Denois

 

 

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La PETITE apARTé scientifique – Que reste-t-il de Jeanne d’Arc ? Ou la carbonisation du bois au secours de l’archéologie

Jeanne d’Arc au bûcher

Jeanne d’Arc au bûcher Hermann Anton Stilke 1843 Huile sur toile Saint-Pétersbourg, Musée de l’Ermitage

Nous y voilà pour le premier bonus de l’apARTé scientifique -petite larme d’émotion … Billy ! Ouvre le champagne !- qui aura pour sujet la carbonisation ou pyrolyse -range ton Pokédex, ce n’est pas l’évolution d’Evoli ! Et puis tu l’as surnommé Rainer en plus ! (petite blague pour les joueurs de PokemonGo)- du bois. Car en effet ce sujet, en marge de celui traité dans l’apARTé scientifique officielle du numéro Ardent, nous intéresse particulièrement en archéologie où certains sites très anciens comme celui de Mureybet -de 9 500 à 8 300 avant Jules César si tu te souviens des cours d’Ariane Thomas … enfin je crois …- nous sont restés justement car certains bâtiments, avec des armatures en bois par exemple, ont brûlés et ne se sont donc pas décomposés. Petite étude de ce phénomène passionnant -si si, je vous jure !

 

Tout d’abord, faisons un petit point sur la composition du bois, parce qu’il est complexe le bougre ! Donc dans du bois vous avez : des « extraits » (résines, tanins, pigments, …) entre 4 à 15 %, de la lignine entre 18 et 35 %, de l’holocellulose (cellulose et hémicelluloses) entre 40 et 60 % et des « cendres » (oxydes de Ca, K, Na, Mg, Si, Fe, P, …) pour environ 1 %.

Du calme Billy du calme ! On va voir les choses dans l’ordre ! Concentrons nous sur les trois principaux composant du bois : lignine, cellulose et hémicellulose. Je pourrais me lancer dans une explication compliquée avec plein de noms en -ose et en -ane mais en bref, c’est du carbone (C), de l’oxygène (O) et de l’hydrogène (H). Je donne les formules semi-développées pour les courageux et les fous (dont je fais partie –#chemicalorgasm !  :

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Ainsi, on peut considérer que la composition moyenne chimique du bois est : CH1,44O0,66. J’avoue, ça ne va pas nous servir des masses -molaires ! … Rigole Billy !- mais j’aime avoir une belle formule propre. Car en effet, le bois étant composé de divers éléments, chacun réagit indépendamment à la pyrolyse ! Alors allons-y !

 

La pyrolyse (on ne parle pas ici de combustion, qui est en fait une pyrolyse suivie de la combustion des gaz formés) est un procédé de transformation de solides en gaz divers par leurs décomposition. En clair ce n’est pas un bête changement d’état comme pour l’eau par exemple, la molécule est séparée en plusieurs plus petites qui sont plus stables à une température donnée, souvent sous forme gazeuse. Je me contenterai ici de la pyrolyse lente, pour laquelle j’ai beaucoup plus d’informations -oui, ça veut dire qu’il en existe une rapide, t’es un p’tit génie toi !- et parce que c’est ce qu’il se passe en général lors d’un feu de bois.

 

De ce fait, lors d’une pyrolyse, on observe une déshydratation du bois aux alentours de 100 °C. Puis a lieu un dégagement de dioxyde de carbone (CO2), d’eau (H2O) et d’acide acétique (CH3COOH) entre 100 et 250 °C. Ensuite, de 250 à 500 °C a lieu un dégagement gazeux rapide de monoxyde de carbone (CO), de dihydrogène (H2) (qui se lie directement au dioxygène (O2) de l’air pour former de l’eau) et de méthane (CH4) et la formation de goudrons. Enfin, quand la température dépasse les 500 °C se forme une formation de charbon de bois (composé de carbone et de quelques composés minéraux), ce qui nous intéresse tout particulièrement !

 

Tous les mécanismes ne sont pas encore connus mais pour étudier tout ceci de façon plus précise, voici quelques explications.

Les lignines se décomposent tout d’abord en fragments aromatiques (vanilline, syringaldéhyde, phénols et crésols) :

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Puis ces produits aromatiques se décomposent ensuite, au fur et à mesure que la température monte, en méthanol (CH3OH). Enfin, à plus haute température, la lignine est en grande partie à l’origine du charbon de bois.

Les hémicelluloses se décomposent en furfural, furanne, acide acétique et aldéhydes divers, comme le formaldéhyde :

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Pour le cas de la cellulose, on assiste à une hydrolyse interne (adjonction d’eau) et une déshydratation conduisant à un produit primaire qui est le lévoglucosane. Stable jusqu’à environ 210 °C, il se décompose à partir de 270 °C pour donner de l’eau, des acides formique et acétique et des phénols :

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Au-delà de 500 °C une partie des grosses molécules se recondensent pour s’agréger dans le charbon de bois qui provient principalement de la lignine. Les plus petites molécules, en se décomposant à partir de 250 °C, sont responsables quand à elles des différents  gaz formés :

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Ouf ! Nous voilà enfin avec notre charbon de bois ! Voilà la clé de l’éternité pour notre bois, qu’il s’agisse de la charpente d’une maison néolithique ou des piliers d’un temple assyrien ! En effet, cette carbonisation empêche totalement la décomposition. Pour expliciter un peu tout ça : la décomposition ou putréfaction du bois est conduite par divers insectes xylophages, champignons et bactéries qui, en ingérant et digérant le bois (matière organique), le réduisent peu à peu en matière inorganique. Ils le minéralisent ! Pour entrer dans les détails, ils brisent les liaisons des molécules organiques et en tirent de l’énergie, mais cela ne fonctionne que jusqu’à la minéralisation complète, car alors les liaisons ne sont plus aussi fragiles. Ainsi, avec notre charbon de bois composé essentiellement de carbone, plus de décomposition, car ses agents, ne pouvant plus en tirer d’énergie, ne sont plus intéressés !

 

Une carbonisation superficielle du bois est d’ailleurs régulièrement utilisée pour le protéger des outrages du temps. C’est le cas pour la plupart des constructions anciennes imposantes, comme les églises, qui reposent sur des pieux ayant subi une carbonisation. Elle a aussi été utilisée pour traiter le bois de marine d’après les proposition de Henri Cochon de Lapparent (1807-1884), citant entre autres la longévité exceptionnelle du HMS Royal William de 1719 dont les bois auraient été carbonisés. Ainsi les charpentes étaient carbonisées avec de la paille ou des fagots enflammés et certaines pièce de membrure isolée, par de petit feux de copeaux. On  suggérait aussi de leur appliquer du gaz d’éclairage au chalumeau. Comme les bateaux, des traverses de chemin de fer seront traitées par cette méthode. Pour ce qui est de l’architecture, on observe aussi cette méthode au Japon, dans la technique traditionnelle du yakisugi ou shō sugi ban. En archéologie enfin, on retrouve régulièrement du charbon de bois sur les sites. Il peut alors servir autant à mieux comprendre la nature des vestiges en question par 

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sa forme qu’à les dater par carbone 14 (pratique quand on a un truc composé exclusivement … de carbone !). L’étude de ce charbon de bois se nomme anthracologie.

Voilà voilà ! Et en espérant que le soleil estival ne vous carbonise pas, toute l’équipe de l’ApARTé scientifique (Billy et moi) vous souhaite de bonnes vacances !

 

Raphaël Vaubourdolle

 

 

 

 

L’ApARTé scientifique – Les argiles les plus chaudes de ta région ou étude des transformations des matériaux soumis aux fortes températures

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Juin 2019. La canicule s’étend comme une chape de plomb brûlante sur la France. La moindre goutte d’eau vous paraît plus désirable que n’importe quel Marcellus ou torse de Milet. Vous portez à votre bouche une bouteille pour hydrater votre muqueuse qui vous semble plus sèche encore que le désert d’Atacama, à l’argile craquelée. Mais une question arrête votre geste : mais comment se fait-il que l’argile devienne imperméable après cuisson quand moi je peux me réhydrater à loisir ? -oui, vous êtes tarés, du moins moi je le suis et je me rassure en vous imaginant comme tel. Mais plus encore, quels sont donc les mécanismes de transformation des matériaux soumis à de fortes températures ? Nous nous contenterons des matériaux inorganiques parce que quand ça brûle … ça brûle quoi -mais ça serait parfait pour un petit bonus de l’été. Alors prend une bière Billy -1 litre et demi selon FR3, #seventies- et embarquons pour les magnifiques rivages de la physico-chimie !

 

Pour faire court, les différents éléments se trouvent sous trois états : solide, liquide et gazeux. La différence entre ces états provient de l’agitation moléculaire. L’agitation moléculaire ? Qu’est-ce à dirre que ceci ?! En fait, les molécules au sein de la matière s’agitent, frissonnent, remuent le derrière sur on ne sait quelle musique atomique -en tout cas ça doit être de la bombe ! … tuez moi. Si elle s’agitent peu, la fête moléculaire est au plus bas. Des liaisons moléculaires, telles de petits groupes de discussion, se forment et la matière se trouve donc à l’état solide. Quand l’ambiance se chauffe un peu, l’agitation moléculaire augmente, elles oublient le blabla, les liaisons sont moins fortes et la matière devient liquide (c’et la fusion). Mais si on augmente encore la température, toutes se mettent à twerker, à swinguer, à zouker à tout va et aux quatre vents, plus aucune liaison ne vient les restreindre. La matière arrive alors dans son état gazeux, c’est la vaporisation.

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Bon, ça c’est la base, mais cela va nous permettre de répondre à la problématique précédemment édictée -oui je te vois, toi au fond qui ne suis pas et c’est INADMISSIBLE, ne pas se préoccuper ainsi de ces ENJEUX MAJEURS ! … pardon- pour pas mal de matériaux mine de rien. C’est ainsi que l’on parvient à modeler la plupart des métaux, voici un petit tableau récapitulatif des points de fusion de quelques uns d’entre eux :

 

Pour ce qui est du verre, il atteint son point de fusion entre 1400 et 1600 °C  selon sa composition (pour information : le verre silicium, qui est le composant principal de la plupart des verres, atteint sont point de fusion à 1 730 °C). Mais il s’agit d’un solide non-cristallin, donc c’est un peu plus compliqué … disons simplement que c’est un peu comme un liquide mais en très très très visqueux. Je vous laisse avec ça, les plus tarés d’entre vous iront se renseigner (notamment sur le transition vitreuse, fascinant …).

 

Mais passons maintenant plus gros du sujet. Et à la réponse à notre question de départ : pourquoi donc l’argile devient-elle imperméable après cuisson ? Réponse simple de la plupart des sites ou livres : “car elle se transforme en matériau céramique de manière irréversible à très haute température”. Mais votre fidèle fou à lier serviteur ne peut pas se contenter d’une telle réponse, il me fallait aller plus loin. Pour cela, quittons la physique pour la chimie, mon sujet de prédilection : âmes sensibles s’abstenir, il va y avoir de la formule chimique ! Etant donné qu’il existe d’innombrables sortes d’argiles, nous nous contenterons de nous préoccuper de la kaolinite, composante de la plupart d’entre elles. 

Premièrement, sachez que la kaolinite (Al2Si2O5(OH)4) est ce que l’on appelle un silicate d’aluminium, soit un composé chimique d’oxyde d’aluminium, ou alumine (Al2O3), et de dioxyde de silicium, ou silice (SiO2). Hors, lors d’une calcination (cuisson), la kaolinite est soumise à plusieurs réactions chimiques se réalisant à certaines températures précises. Ces réactions permettent la formation d’un matériau céramique, moins perméable, en lieu et place de l’argile : c’est la terre cuite.

La première réaction a lieu, à pression atmosphérique, aux environs de 550 °C, c’est la déshydroxylation. En soit, il s’agit de la séparation de groupes hydroxyles (OH) d’un composé chimique par l’adjonction d’hydrogène (H), ce qui donne un composé instable et de l’eau (H2O). Le composé ici formé est un type de métakaolin –Métakaolin. Pokémon de type silicate d’aluminium anhydre (sans eau liée à lui). Existe sous plusieurs formes– (Al2Si2O5). En formule chimique simplifiée (car je ne représente que ce qui m’intéresse ici) ça donne ça :

 

Al2Si2O5(OH)4 → Al2Si2O5

 

Ensuite commence le plus gros de la composition chimique. C’est ainsi qu’à 980 °C le métakaolin, réagissant avec du dioxygène (O2) présent dans l’air, se scinde en alumine (Al2O3), en un type de spinelle –Spinelle. Pokémon de type PUTAIN DE COMPLEXE. Ne vaut pas la peine d’aller plus loin– (Al2O3 , 3 SiO2) et en silice amorphe (SiO2). Je vous remet une formule chimique, une bien complète celle-ci :

 

3 Al2Si2O5 + 6 O2 → Al2O3 + 2 Al2O3 , 3 SiO2 + 3 SiO2

 

Enfin, à 1 150 °C, l’alumine et le spinelle réagisse ensemble pour former de la mullite, un autre silicate d’aluminium, (Al2O3 , 2 SiO2) et de nouveau de la silice amorphe selon la formule suivante :

 

Al2O3 + 2 Al2O3 , 3 SiO2 → 3 Al2O3 , 2 SiO2 + SiO2

 

Et c’est tout. On s’arrête là. Car en effet les cristaux de mullite ainsi formés rendent la structure bien plus imperméable. La mullite étant stable à toutes les température à pression atmosphérique, cette réaction est irréversible et l’argile utilisée ne sera plus jamais la même.

 

Ah ! Ça fait du bien de répondre de manière satisfaisante à une question qui, si elle ne paraît pas très complexe, représente un vrai casse-tête si on s’y penche un peu. Mais je ne pense pas avoir encore fait le tour de la question. C’est pourquoi je vais sans doute vous proposer un certain nombre de petits bonus estivaux, pour le plus grand plaisir de mon esprit malade et des quelques irréductibles lecteurs qui, en pleines vacances, continuent à lire notre grand et magnifique Louvr’Boîte.

 

Raphaël Vaubourdolle

 

Le bronzage

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Le homard

Crème solaire, parasol, paréo, combi de plongée, rien n’y fait, vous brûlez. Malgré l’indice 150 (si, si, vous en êtes sûr) de votre crème solaire vous voilà transformé en écrevisse sans préambule. Pour les plus chanceux d’entre vous, bande de mollusques, vous en ressortirez bronzés. Pour les autres, cette période de souffrance se soldera par un échec total et le retour à votre teinte plancton habituelle. Votre salut : la Biafine.

 

Le rôti

Ficelé.e dans votre bikini ou votre slip kangourou (ceci est un jugement de valeur) vous vous dorez la pilule sur la plage. Tartiné.e de monoï, vous luisez au soleil et aveuglez tous les bronzeurs, surfeurs, et vendeurs de la plage. Tel une sardine à l’huile d’olive passée au barbecue, vous surveillez votre cuisson en changeant de face d’exposition. Veillez à ne pas vous oublier, au risque de frire dans votre propre huile (de bronzage). Votre salut : le parasol.

 

L’anglais.e

Tel nos amis touristes d’Outre-Manche vos bras et vos cuisses portent les stigmates de vos choix de vie peu judicieux. Résultat de votre tentative pitoyable (mais salutaire) de sortir de chez vous et de voir des gens, vous arborez de charmantes démarcations dont vous ne vous débarrasserez pas d’ici la fin de l’été, et ce malgré toutes vos tentatives. Votre salut : passez de l’autre côté de la Manche et fondez-vous dans la masse.

 

La vache

A cause d’une application foireuse de crème solaire vous vous retrouvez tacheté.e d’empreintes digitales façon Marguerite 2.0. Vous passerez en effet votre été dans le pré à regarder le train de l’amour d’été/du coup d’un soir vous passer sous le nez en ruminant. Votre salut : la PLS.

 

Le trou

Vous aviez tout planifié : crème solaire, monoï, alternance bronzage-baignade, vous étiez paré.e à toute éventualité. Selon vos prédictions vous auriez dû être parfaitement doré.e, mais ce jean troué vient de vous humilier de la pire manière. Tombés en disgrâce, vos genoux viennent de ruiner vos sorties plage pour le reste de l’été. Votre salut : rester éloigné.e des tropéziennes.

 

Le caramel

Doré à souhait, parfaitement huilé, votre bronzage fait saliver. Goal ultime de l’été, vous refusez pourtant de confier votre secret. En même temps vous passez vos aprem’ ensoleillées sur votre balcon à vous bronzer le double menton à la feuille d’alu tel le kéké/la cagole que vous êtes. Votre salut : trouver un but à votre existence.

 

Le Trump

L’autobronzant et les UV sont vos amis de l’été, et ça se voit. Sensé vous donner un teint délicieusement hâlé, vous vous retrouvez maintenant couleur zlabia et ressemblez à un (mauvais) sosie du Président américain. Votre salut : le repli stratégique.

 

 

Inès Amrani

J-1 GALA : Le bonnacon ou l’animal oublié des enluminures fantasques

Dans le monde des créatures magiques et légendaires, où règnent les dragons, les basilics, les phœnix et autres joyeux lurons à la Harry Potter… Voici le bonnacon ! Non, personne ne connaît, hormis les amateurs des bestiaires médiévaux et des enluminures douteuses. Il mérite cependant à être l’une des créatures les plus loufoques !

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Bestiaire d’Aberdeen

Cet animal au corps de bœuf, à la crinière de cheval et aux cornes recourbées en arrière juste au dessus de son crâne, n’a en soi, rien d’extraordinaire sur son apparence. Il apparaît dans l’Histoire Naturelle de Pline (VIII, XVII, 1) et viendrait de Péonie entre Macédoine et Bulgarie, l’auteur montre son incapacité de combattre ce qui l’a poussé à développer un système de défense tout particulier. Le bonnacon fuit, mais attention, il fuit en projetant une fiente jusqu’à 75 ares soit environ trois mètres* (nouveau record du monde) ! De plus, sa projection a la propriété de s’enflammer sur tout ce qu’elle touche, arbres, lacs, hommes, même votre chaton préféré… Quel est le chasseur qui a eu la brillante idée d’allumer une allumette près d’une flatulence d’un bœuf ?

 

La légende a ensuite été reprise dans les Bestiaires, d’après les sources que donnent Pline et Solin, à une différence près, notre bovidé pétomane viendrait d’Asie. Au Moyen Âge, sa représentation est toujours la même, elle dépeint le moment fatidique où le bonnacon lâche ses excréments sur les chasseurs qui le poursuivent, tentant de se protéger tant bien que mal avec un bouclier. Pourquoi le représenter ainsi ? Il n’y a qu’une unique hypothèse chez Thomas de Cantimpré (Liber de natura rerum, VI, 11) pour qui l’animal représente les bons dignitaires de haut rang de l’Église qui s’infligent une vie d’austérité comme s’ils avaient des cornes du bonnacon qui leur meurtrissaient ses chairs. Tout en l’imposant à ceux qui sont placés sous son autorité, sans autant les blesser, pour montrer leur propre acceptation d’ascèse et d’assurer leur Salut. Cette interprétation est alambiquée, ce cher Thomas a dû un peu forcer sur le vin ou la bière pour ne retenir que la caractéristique la moins gênante…

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Appréciez ce splendide dégradé… et cette tête coupable qui semble dire « ouuuups désolée ça m’a échappé… » !

Une chose est sûre, le bonnacon serait parfait pour revenir sur le devant de la scène dans le monde fantastique des bizarreries médiatiques d’un griffon ou d’une manticore aussi agréables à voir que la facture de votre dernière soirée. Un peu d’humour fait du bien.

 

* pour d’autre il s’agirait de 600 mètres, mais ne vous fiez pas à Wikipédia, sinon ce serait une bête de compétition qui concurrencerait les snipers

 

Déborah Philippe

J-3 GALA : Top 5 des fantômes du patrimoine parisien

Même si juin n’est pas le mois où l’on fête Halloween, il y a toujours des lieux où rôdent des spectres fascinants dans le Paris que nous aimons tendrement pour son patrimoine incroyable et ce, toute l’année ! N’avez-vous jamais ressenti des moments d’angoisse dans les couloirs du passé que nous arpentons pour découvrir de nouvelles merveilles, armés de notre carte d’étudiant de l’EDL ? Un  murmure dans une langue étrangère, le cœur battant, sensible aux moindres mouvements autour de vous ? C’est que l’on ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre, dans ces somptueux lieux qui nous captivent autant qu’ils nous impressionnent… et parfois on peut craindre de tomber en pleine cérémonie de secte au chant tamoul comme dans Eyes Wide Shut de Kubrick ! Âmes sensibles, s’abstenir pour ce top 5 des fantômes du patrimoine parisien !

 

NUMÉRO 5 – LE MEURTRE DU MÉTRO

 

Alors que la voiture de première classe s’arrête station Porte-Dorée sur la ligne 8 dans le https___hansdejongfotografie.files.wordpress.com_2014_04_toureauxdetectuve12ème arrondissement, les six nouveaux passagers montant à bord découvre une belle femme rousse qui semble être assoupie. Alors que celle-ci se balance doucement, elle glisse peu à peu au sol et un médecin parmi eux craint le malaise de celle-ci. En l’assistant, il découvre alors un couteau Laguiole planté dans son cou et une mare de sang à ses pieds. La chose choque, d’autant plus qu’à l’ouverture des portes, la jeune femme était seule dans la voiture ! Le ticket de la victime, qui se nomme Laetitia Toureaux, a été poinçonné à la station précédente où elle était seule à être montée. Où est donc passé le meurtrier ? La presse s’empare du fait divers et Paris-Soir révèle ainsi qu’elle serait une espionne au service des Italiens chez qui elle est née. Vingt-cinq ans plus tard, en 1962, une lettre parvient à la police où un homme se disant médecin, affirme être l’assassin de la jeune femme qui l’avait éconduit alors qu’il était amoureux d’elle. Comment a-t-il pu s’échapper ? Il avoue avoir utilisé une “clé de pompier” pour passer d’une rame à l’autre pendant que le métro était en marche entre les deux stations. Mystère résolu alors, bien que d’après certains usagers du métro, un long frisson les parcourt encore à la station Porte-Dorée avec ce sentiment étrange que quelqu’un les observe lourdement… 

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NUMÉRO 4 – PHILIBERT ASPAIRT DANS LES CATACOMBES

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Qu’il est dur, lorsque l’on n’a pas l’aide d’une Ariane, de sortir d’un véritable labyrinthe souterrain ! Certains le savent bien comme Philibert Aspairt, portier du Val de Grâce. En empruntant un escalier qui se trouve dans la cour du couvent, l’homme s’aventure dans un dédale dont il ne reviendra jamais. Porté disparu et retrouvé seulement onze plus tard, il est identifié en 1804 grâce aux clés du Val de Grâce qu’il portait à sa ceinture. Il est depuis enterré sur place et une stèle érigée sur place indique ainsi : « À la mémoire de Philibert Aspairt perdu dans cette carrière le III (3) Novbre MDCCXCIII (1793) retrouvé onze ans après et inhumé en la même place le XXX (30) Avril MDCCCIV (1804) ». La stèle est aujourd’hui encore visible dans le Grand Réseau Sud, sous la rue Henri Barbusse, à proximité du boulevard Saint-Michel. Certain disent d’ailleurs encore croiser son fantôme errant dans les catacombes à la recherche de la sortie… Avis aux promeneurs nocturnes !

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NUMÉRO 3 – LE FANTÔME DE L’OPÉRA

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À l’opéra Garnier, qui n’a jamais entendu parler de la fameuse loge n°5 réservée au fantôme de l’opéra ? En effet, les directeurs de l’Opéra se voient réclamer 20 000 francs par mois de la part d’un certain « Fantôme de l’Opéra » qui exige que cette loge lui soit réservée. Mais qui cache derrière cette diaphane identité ? Le 28 octobre 1873, le conservatoire de la rue Peletier est en flammes. Ernest, jeune pianiste prodige, parvient à s’échapper de l’incendie bien que son visage est à moitié brûlé au troisième degré. Aquarelle d'André Castaigne illustrant la première édition américaine du roman (1911).jpgComble de malheur, sa fiancée ballerine du même conservatoire, succombe dans l’âtre de feu. Éploré, il se cache dans les souterrains de l’opéra Garnier en pleine construction où il pleure jusqu’à sa mort son amour perdu. Son cadavre n’est jamais retrouvé, sans doute confondu avec les corps des communards. En 1910, Gaston Leroux s’approprie cette histoire en la liant à d’étranges événements liés à la célèbre institution. Le grand lustre de la salle se serait décroché pendant une représentation du Faust de Gounod, tuant ainsi le spectateur assis à la place 13. Un machiniste est retrouvé un jour pendu, une danseuse décède en tombant d’une galerie. Un chat noir meurt accidentellement sur l’estrade conduisant à la scène, etc. De quoi inspirer le grand écrivain pour ses fameux personnages Christine Daaé, Erik ou encore le vicomte de Chagny !

 

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NUMÉRO 2 – BELPHÉGOR AU LOUVRE

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Tous les Édléiens doivent au moins voir un jour le film Belphégor, le fantôme du Louvre, dans leur vie ! En voici le synopsis : « Dans le Paris de l’an 2000, une momie aux pouvoirs maléfiques donne naissance à un fantôme nommé Belphégor, dieu des Ammonites. Celui-ci, à la nuit tombée, hante le musée du Louvre, dont la Pyramide de Peï est devenue le symbole universel. Tour à tour effrayant ou humain, ce fantôme a toutes les audaces et 7v7AyrW6HD9YTPkcXSuMEiyoOPZ.jpgsemble invincible.Un gardien est retrouvé mort aux pieds de sa statue. Martin, un électricien, mène alors l’enquête. Mais il est bientôt harcelé par des lettres signées de la main du fantôme… ». Et dans ces fameuses lettres justement, des symboles vont mener tout droit les héros à l’École du Louvre pour continuer l’enquête… Bien sûr, ce n’est qu’un film mais il n’empêche qu’on aime bien espérer que la momie du Louvre elle ne se réveille jamais… Quoique…

Les petits nouveaux, bon courage pour vos TDO d’Archéologie égyptienne !

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NUMÉRO 1 – LES FANTÔMES DU PÈRE LACHAISE

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S’il y a bien UN lieu à Paris qu’il faut visiter pour ses fantômes, c’est bien le cimetière du Père Lachaise qui compte au moins un million de morts enterrés en son sein ! Des messes sataniques clandestines s’y dérouleraient mais ce qui est certain c’est qu’il y a déjà des visiteurs que l’on peut croiser aujourd’hui psalmodiant des mots étranges devant la tombe d’Allen Kardec, père du spiritisme. D’illustres fantômes peuplent les rues de ce curieux village silencieux ouvert en 1804. Balzac, Molière, Chopin, Wilde, Ernst, Morrison, Piaf, Héloïse et Abélard. Je n’ai jamais eu d’affinité pour le monde mortuaire mais pour l’avoir visité une fois en novembre en compagnie d’un être cher, il y avait là une somptueuse douceur triste, un air nostalgique et rêveur, une tendresse muette qui lient ses tombes les unes et autres. Les pierres murmurent le nom des défunts mais la beauté des monuments funéraires et l’honneur d’être en présence de ces êtres immortels subliment de manière onirique cette irréelle, profonde et sereine rencontre… au point de nourrir une curieuse imagination chez certains. Je vous laisse le plaisir de découvrir cette jolie bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=iTwlga6hoY4

 

Laureen Gressé-Denois

J-5 GALA : Le follow-up de vos personnalités mythiques préférées !

  • Le mec qui s’est enfermé avec l’Aphrodite de Cnide.

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PEGI 18 !

  • Déesse Lama.

 

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Déesse de protection dans le monde mésopotamien, elle était déjà secondaire pendant l’Antiquité. Alors bon, on la mettait ça et là pour se protéger quoi. Entre Gudéa et les Amorites de Mari tout le monde la représente parce que bon on va pas se mentir c’est pratique une déesse qui protège.

Mais que devient-elle après toutes ces années ? C’est pas trop ça pour notre petite déesse lama. Un peu oubliée de tous, seuls quelques Édliens aguerris se souviennent d’elle pendant les examens. Ces derniers sont le moment que choisissent certains pour honorer Ganesha pour s’assurer la réussite, alors la déesse Lama est encore délaissée. Pourtant, la protection contre les mauvaises notes telles de mauvais esprits ça peut être pratique. Alors cette année faites un geste et pensez à la déesse Lama !

  • Ningirsu.

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Ningirsu pendant la 1ère et la 2nde dynastie de Lagash c’était THE dieu mais bon rapidement tombé dans l’oubli, on le retrouve sur le kudurru de Méli-Shipak II sous la forme d’une charrue. Oui, LE dieu de la stèle des vautours n’est plus qu’une charrue. Alors certes une charrue c’est bien pratique mais bon quand on était dieu tutélaire c’est pas la meilleure des évolutions de carrière.

  • Boddhisattva Maitreya.

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Le boddhisattva Maitreya est le Bouddha du futur. Autant tuer le suspense tout de suite, il attend toujours.

  • Le gars qui a décidé d’ouvrir les portes de Troie au cheval des Grecs

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Spoiler alert : « le mec est dead » comme dirait une chère amie. Il est actuellement aux Enfers avec tous les autres Troyens, ils rejettent toute la faute sur lui, c’est un peu le bouc émissaire de la bande mais il persiste à dire qu’il a seulement suivi les ordres. Après tout c’est plus facile de blâmer une seule personne alors que la cité entière n’a pas voulu écouter Laocoon (bon ok, les dieux ne voulaient pas que les Troyens l’écoutent on sait bien) et Cassandre. On peut donc souvent le trouver seul, ou bien accompagné, sous un arbre en train de rager aux Enfers.

  • Tarpeia

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Pour le bon déroulement, on va dire que les Enfers des Romains et des Grecs sont les mêmes (après tout, c’est le même panthéon, juste pas les mêmes noms). En fonction de la fin que vous choisissez (je spoile à nouveau, écrasée sous les boucliers des Sabins ou jetée du haut d’une roche), Tarpeia est toujours morte et aux Enfers, rejetée aussi par les Romains qui la maudissent d’avoir ouvert les portes de la cité (l’histoire se répète quand même un peu). La légende dit qu’elle a maintenant la phobie des boucliers mais qu’elle a rencontré un mec bien qui est souvent assis sous un arbre, en train de pester contre les dieux et les Grecs.

  • La marquise de Dai

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Ils sont un peu tous morts je suis désolée pour vous, mais elle c’est un peu particulier puisqu’elle était posée au calme dans ses cercueils, ses tissus et son liquide (un peu bizarre) de conservation. Elle est restée inhumée plus de 2 000 ans sans dérangement mais on l’a dérangée au siècle dernier et depuis, la chose que les étudiants en histoire de l’art retiennent le plus souvent c’est qu’elle est morte en s’étouffant avec une peau de melon. Elle m’a donc demandé de faire passer un message au public, qui dit qu’elle était une personne importante à la cour de son époque et qu’elle peut donc envoyer tous les fantômes et cadavres des armées à vos trousses, mais aussi qu’il faut qu’on s’intéresse à tout son mobilier (très beau et varié, on connaît bien la bannière) et à son état physique très remarquable avant cette mort un peu stupide.

  • La main gauche de la Victoire de Samothrace

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La légende dit qu’elle existe toujours, soit à Samothrace et que c’est pour ça que L. Laugier retourne souvent là-bas pour la retrouver, soit en morceaux dans les réserves du Louvre et qu’elle attend seulement un édlien courageux et passionné pour la reconstituer et lui redonner sa place parce qu’elle en a marre d’être seule. Le bruit court qu’elle monte une coalition avec les deux bras et la tête de la Victoire pour être reconnue à sa juste valeur.

 

 

Tyfenn Le Roux et Salomé Legrand

J-6 GALA : Le monstre du Loch Ness : pourquoi les mythes ?

Une fois n’est pas coutume, je vais commencer cet article en évoquant un rêve d’enfant : rencontrer le monstre du Loch Ness. Quand j’en ai entendu parler pour la première fois, je devais avoir environ huit ans. Prenons en compte le fait que j’étais fascinée par les dinosaures et que déterrer des squelettes de grosses bêtes me faisait rêver (on se demande pourquoi j’ai atterri à l’École du Louvre). Imaginez un peu le tourbillon d’idées, d’émotions et le rêve de gosse que voir cette espèce de gros dinosaure marin représentait pour la gamine que j’étais.

Cette histoire était toujours dans un petit coin de ma tête. J’avais envie d’aller en Écosse juste pour voir le lac et apercevoir le monstre. Puis, au bout de quelques années, j’ai appris qu’il ne s’agissait que d’un canular (du moins à la base) et que de nombreuses études avaient été réalisées dans le but de réfuter les « preuves » avancées par les personnes affirmant avoir vu le monstre. Déception totale. Mon petit rêve de rencontrer une créature aussi fabuleuse s’effondrait doucement et silencieusement.

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En apprenant le thème du Gala de cette année (comme tout le monde, en novembre en janvier), la première image qui s’est imposée dans mon esprit, ça n’était pas une image de dieu ou de monde mythologique. La première chose qui m’est passée par la tête, c’est le monstre du Loch Ness. En y réfléchissant, je me suis rendu compte que cette grosse bête (que j’imagine globalement comme une baleine à long cou avec une tête de diplodocus) occupait une place assez importante dans mon imaginaire, et je ne pense pas être la seule dans cette situation. Car même si les mythes nous font rêver et alimentent notre imaginaire depuis toujours, ils ont tout de même été créés par les hommes. Pourquoi ? Pourquoi avoir créé quelque chose qui ne résiste pas à l’épreuve de la science ?

 

On peut se pencher sur ce que racontent les mythes (rassurez-vous, je n’ai pas la prétention de donner ici toutes les clés de compréhension d’un sujet qui mériterait des volumes entiers) afin de les comprendre. Dans son ouvrage sur la Psychanalyse des contes de fée, Bruno Bettelheim analysait la différence entre le mythe et le conte, mettait en avant le fait que le mythe comportait toujours une dimension qui nous dépasse. Pour prendre l’exemple des mythes grecs, ils concernent en grande partie les divinités auxquelles il arrive des aventures plus rocambolesques que la coupe de cheveux de Ludovic Laugier. Un mythe, c’est une histoire qui, d’une certaine façon, nous dépasse, qu’on ne pourra jamais atteindre et qui restera hors de portée. C’est de l’ordre de l’inatteignable, plus haut que le swag de Beyoncé et du Président du BDE réunis. Bref, vous voyez le genre.

 

Mais dis donc Jamy, pourquoi créer de telles histoires ? On peut imaginer plusieurs raisons dont l’une d’elles serait que ça nous pousse à chercher plus loin que ce que l’on connaît. Pour rester avec le monstre du Loch Ness, le mythe nous pousse à examiner les frontières de notre monde et de nos connaissances pour voir si ce que l’on connaît correspond à la réalité que l’on pourrait imaginer. En d’autres termes, on peut se demander si le mythe pourrait devenir réalité ou s’il resterait si mythique qu’il en a l’air. Dans le cas de Nessie, des études ont démontré qu’un monstre ne pouvait techniquement pas vivre dans le Loch Ness à cause de sa taille trop importante (donc là, c’est bien la taille qui compte).

 

Et pourtant, une petite partie de moi a toujours envie d’aller en Écosse pour aller sur les berges du Loch Ness et essayer d’apercevoir cette bestiole. Même si je sais qu’elle ne peut pas exister, que c’est impossible. Et c’est une autre dimensions du mythe qu’il est important de prendre en compte : en plus de nous aider parfois à remettre en question les limites de nos connaissances, il nous donne quelque chose en quoi croire, un rêve fantastique et puissant qui reste présent par son aura d’improbabilité et de questionnement qu’il suscite en nous.

 

Alors voilà, un jour, j’irai en Écosse pour voir que le monstre du Loch Ness n’existe pas et qu’il est juste une créature qui m’accompagne mentalement depuis tout ce temps. Et peut-être pour quelques années encore.

 

Viena

 

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J- 9 GALA : Licornes, pandas, dahuts, mammouths et autres olgoï-khorkhoïs

Normalement là vous vous posez une question simple : mais c’est quoi ce titre, il a bu ou quoi ? Alors déjà oui, bien sûr ! Et ensuite vous allez voir que tout ceci est parfaitement LOGIQUE -Billy il m’a dit que oui donc c’est vrai ! Et puis vous êtes des méchants d’abord, voilà !

 

À vrai dire, dans cet article on va parler de cryptozoologie, c’est-à-dire l’étude des animaux dont on pense qu’ils n’existent pas mais que peut-être qu’en fait qu’ils existent… FARPAITEMENT ! Pour vous expliquer cela : il s’agit d’une pseudo-science qui vise à réunir (pour ses membres sérieux) les témoignages de populations indigènes ou d’explorateurs portant sur de grands animaux (plus gros qu’une poule d’eau… pourquoi pas…) non-reconnus par la zoologie actuelle. Donc en soi, il s’agit d’une véritable démarche scientifique, seulement on ne connaît ces animaux que par les témoignages humains. En fait, la cryptozoologie se base sur une négation du dogme de l’omniscience, commun en science, qui consiste à penser (souvent inconsciemment) que tout ce qui n’a pas été découvert par la science n’existe pas, ce qui se trouve être, bien entendu faux. Pour preuve de cette dernière affirmation : au début du XXe siècle, les physiciens annonçaient que la physique n’avait plus rien à découvrir, puis Einstein (entre autres) est arrivé… –sheh ! Cela est d’autant plus compréhensible en zoologie que l’homme n’a pas encore exploré toute la planète et que de nombreux sites restent encore quasi voire totalement vierges de présence humaine. En ce cas, comment affirmer que l’on a connaissance de tous les grands animaux qui peuplent notre planète ? Pour ce qui est de la question des sources, la plupart des espèces étaient connues des indigènes, parfois en tant que simples légendes, avant notre science occidentale, alors pourquoi leurs témoignages ne devraient-ils pas être pris au sérieux ?

 

On retrouve assez peu de représentations de cryptides dans l’art. Bien sûr on connaît les différents protomes, statues et dessins de griffons apotropaïques antiques. Les bestiaires de la fin de l’Antiquité et du Moyen-Âge comme le Physiologos (et ses dragons, phénix, cynocéphales, sirènes ou autres licornes) sont aussi autant de supports aux représentations en enluminures de ces animaux. Les licornes pasted image 4.pngjustement ! Il s’agit sans doute du cryptide le plus mainstream ever, alors je vous le dis tout de suite les amis, il n’existe aucun cheval à corne pétant des arcs-en-ciel dans notre dimension. Même les cryptozoologues n’y croient pas, c’est dire ! Pour autant, on la considérait au Moyen-Âge comme aussi réelle que les biches et les chamois, au même titre que les cryptides précédemment cités d’ailleurs. Rapidement devenu un symbole chrétien de pureté voire de l’Annonciation –même si on ne m’enlèvera pas de l’esprit qu’il s’agit d’abord d’un symbole pénien très apprécié de tous les bons cryptozoophiles (si si, ça existe)–, on la retrouve dans quelques œuvres monumentales telles que la tapisserie de la Dame à la Licorne. Enfin, on pourrait aborder le sujet épineux du dahut, un cryptide purement français –cocorico ! Moi ? Chaunnameduvin ? Noooon !–, et plus précisément alpin, dont on retrouve des exemples jusque dans les plus grandes œuvres néoclassiques comme le Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard de Jacques-Louis David –juré sans trucage ! Il s’agit en fait d’une sorte de chamois à tête et oreilles de Saint-bernard et à queue de vache –calme-toi Pasiphaé ! J’ai dit de vache !– qui a pour particularité d’avoir les pattes plus courtes d’un côté que de l’autre et ne peut donc tourner autour des montagnes que dans un sens. Mouais, nos cryptides manquent quand même un peu de classe…

 

Mais plus sérieusement, plus on se rapproche de la véritable cryptozoologie, plus on ne peut qu’en admirer le manque de représentations dans l’art classique. En effet, la plupart des cryptides sont moins sexys que les centaures ou les sirènes –bien que la queue de poisson me bloque un peu, mais je m’égare…– et sont donc moins connus et peints. Outre en effet les hominidés type yéti (qui pourrait d’ailleurs très pasted image 3.pngbien être un ours), sasquatch ou homme sauvage d’Asie, qui soulèvent un grand intérêt du fait de leur apparente proximité avec notre espèce, la plupart des sujets d’étude des cryptozoologues sont aussi palpitants que des félins aquatiques, de très gros serpents, des poissons aux formes bizarres ou des éléphants américains : en bref, des animaux existants mais (plus ou moins) légèrement différents. Prenez comme exemple la baleine sans nageoire dorsale de l’Atlantique Nord, l’ahool (une chauve-souris javanaise de 3,80 mètres d’envergure) ou encore l’adjule (ou loup du Sahara)… pas tout à fait des blockbusters cryptozoologiques. Ainsi, à part les spécialistes et les grands curieux, ils ne fascinent pas grand monde et leur intérêt artistique reste donc très faible.

 

Pour autant, il en existe des plus excitants que d’autres. Par exemple la cryptozoologie couvre aussi tous les animaux apparemment disparus qui auraient eu l’audace de survivre à la main vengeresse de l’homme : mégalodons, thylacines, félins à dents de sabre divers, pachydermes et singes préhistoriques, etc. Le cas du mammouth paraît assez sympathique, car ce gentil pachyderme laineux ne serait ainsi pas, d’après les cryptozoologues, tout à fait éteint et vivrait encore dans les taïgas sibériennes. À l’appui ? De nombreux témoignages. Le plus ancien, faisant mention d’un éléphant velu aperçu au-delà de l’Oural par des Cosaques, daterait de 1580, soit avant la découverte du mammouth par les scientifiques occidentaux en 1799. De nombreux autres témoignages ont ensuite fusé tout au long du XXe siècle. Impossible vous dites-vous ? Mais souvenez-vous que la Sibérie représente un territoire immense et très peu peuplé, dans les forêts duquel un pachyderme plus petit qu’un éléphant d’Asie pourrait très bien se cacher. Donc pourquoi pas ?

 

Il existe aussi des cryptides bien pétés et ridicules… comme l’olgoï-khorkhoï du désert de Gobi ! Bon, outre le fait qu’il ait un nom aussi rocambolesque que la naissance de Ganesh –blague d’edlien !– il s’agirait surtout de la créature la plus… minable de toute la création. En fait, il s’agit d’un ver rouge sombre de 60 à 90 pasted image 1.pngcentimètres de long pour vingt de diamètre ressemblant à un intestin de vache, sans yeux ni tête, se tortillant sur le sol. Cet animal n’aurait aucune chance de survivre s’il n’était pas apparemment doté d’une capacité de tuerie assez phénoménale, qui le hisserait au rang des pires saloperies de notre belle Terre derrière Adolf Hitler et ces emmerdeurs de chats. Ainsi, il pourrait tuer un homme, un chameau ou un troupeau d’animaux par simple contact voire à distance, peut-être grâce à des décharges électriques. On cherche donc un Pikachu mongol rouge sang de la forme d’un très gros boudin… Impeccable !

 

Pour finir, j’aimerais vous conter l’histoire du grand panda de Chine (Ailuropoda melanoleuca taxonomistorgasm ? Taxonomistorgasm !) qui, si vous vous imaginez qu’elle n’a rien à voir avec le sujet, pourrait très bien vous faire réfléchir très fortement sur la question de la cryptozoologie. En 1868, le père Armand David, lazariste basque de son état, s’en va en mission pour la deuxième fois en Chine avec un but d’évangélisation, mais aussi de prospection du vivant pour le Museum d’Histoire Naturelle de Paris. Il décrira ainsi de nombreuses espèces de plantes et d’animaux. En 1869, il découvre dans les piémonts de l’Himalaya une peau blanche et noire et demande à ce qu’on lui ramène l’animal à qui elle appartient. On ne peut lui apporter qu’un jeune panda mort et il fait son rapport au Museum d’Histoire Naturelle mentionnant une nouvelle espèce d’ours asiatique. Les expéditions occidentales s’enchaînent ensuite, telles que celle d’Ernest Henry Wilson en 1908, ou celle de John Weston Brooke, qui en aurait tué un la même année, ou encore celle de  James Huston Edgar, qui en aurait vu un en 1916, etc. En soit, à ce stade, le grand panda est très proche du statut de cryptide, et on ne parvient à en capturer un qu’en 1929, avec l’expédition de Theodore Jr et Kermit Roosevelt, fils du président Roosevelt, de Jack Young, de Herbet Stevens, de Philip Tao et de Suydam Cutting. En bref, un animal de la taille d’un ours a échappé pendant 60 ans à toute une tripotée de scientifiques et de chasseurs aguerris, qui savaient pertinemment où il vivait et étaient assurés de son existence. Au regard de cette histoire, comment ne pas se demander le nombre d’animaux qui nous passent entre les doigts si nous ne faisons que croire qu’ils existent ?

 

Raphaël Vaubourdolle

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En tandem : L’archéologie en bulles, quand la BD fait de l’art.

Il y a de ces grands artistes qui ne sont pas assez reconnus dans le monde de l’histoire de l’art et non, malheureusement, nous n’écrivons pas un article pour rendre hommage à l’intermittent du spectacle qui fait s’élever des bulles de savon arc-en-ciel par-dessus l’Arc de Triomphe du Carrousel. Nous avons plutôt décidé de vous parler du lien entre archéologie, histoire de l’art et bande dessinée, comme exploré à travers l’exposition de la Petite Galerie du Louvre, jusqu’au 1er juillet 2019, intitulée « L’archéologie en Bulles ».

             Aussi décalé que ce binôme puisse paraître – archéologie et BD – cette association est en réalité très pertinente. L’exposition, répartie en cinq thématiques, propose d’approfondir le lien entre « artistes et archéologues » – d’où le nom de la première partie – d’une part par la corrélation entre les méthodes, car les deux domaines [ATTENTION SPOIL] ont recours à la pratique du dessin. Même avant la naissance de la discipline scientifique, les amateurs et voyageurs s’équipaient impérativement (entre autres) de carnets de dessins, afin de croquer tous les vestiges, œuvres et objets qu’ils voyaient, pour la mémoire et pour la diffusion. D’autre part, la relation entre artistes et archéologues est étudiée avec humour à travers la vision de l’archéologue dans les bandes dessinées : on les connaît toutes, ces figures d’explorateurs, aventuriers et détectives qui ne s’éloignent de la réalité que par leurs fantastiques aventures. Mais les artistes et les archéologues mènent alors dans ces épopées les mêmes objectifs de résolution d’énigmes posées par l’histoire. Cette partie fait bien sûr appel à des paysages de l’Egypte, notamment rendue célèbre par la fameuse expédition napoléonienne de 1798 à 1801, qui sont souvent associés à de sombres mystères.

             La sibylline Egypte n’est pas en reste de toute l’exposition. Elle permet au visiteur d’aborder la seconde partie sur les trésors archéologiques. Il est d’ailleurs accueilli par le portrait de Jean-François Champollion (Léon Cogniet, 1831) en couleurs chaudes, histoire de nous faire entrer dans l’ambiance désertique des fouilles. Le terme de « trésor », exploré par le second thème, revêt différentes formes en archéologie, réunies autour de l’idée de la découverte de quelque chose qui a été enfoui dans le sol, volontairement, d’objets plus ou moins précieux selon leurs matériaux ou leurs significations d’alors (comme des dépôts votifs, de fondation d’un sanctuaire etc.). Comme pour la première section, on complète cette vision de l’archéologie, ou de l’archéologue, par le prisme de la BD qui voit bien souvent dans ces découvreurs, ou ces « inventeurs » selon le terme employé en archéologie, des figures héroïques en quête de ces trésors devenus éminemment exceptionnels, la plupart du temps mis en scène de manière extraordinaire à vous donner envie de devenir archéologue. En évitant souvent la partie poussière, terre sous les ongles, restes de vaisselle en terre-cuite et tutti quanti. L’exposition n’oublie évidemment pas de mentionner les trésors sous-marins, dont les méthodes et les moyens de recherches s’étoffent de plus en plus depuis quelques décennies, illustrés par la statue en bronze d’Apollon découverte en 1832 au large de Piombino (Italie) qui appartient aux collections du musée du Louvre.

             Les collections du musée du Louvre sont d’ailleurs une sorte de fil conducteur dans la Petite Galerie, car les objets archéologiques qui illustrent le propos de l’exposition sont sortis de leurs salles. On en voit beaucoup dans la troisième section intitulée « Classer pour comprendre ». Celle-ci est plus centrée sur les méthodes de l’archéologie en nous montrant par exemple, dans une large et longue vitrine, de petits objets alignés sur des crochets, selon leur positionnement théorique dans une coupe stratigraphique, dans une sorte de reconstitution d’un sol de fouilles. Le bédéiste, bien qu’évoluant dans un univers souvent inventé, s’emploie la plupart du temps à recomposer ces strates du temps lui aussi, à faire des typologies d’objets à travers ses planches et à équiper ses héros de tous les ustensiles nécessaires.

             Le petit circuit nous emmène ensuite du côté de l’interprétation et du rêve, dans la section « Interpréter et Rêver », qui sont, somme toute, des caractéristiques communes aux deux domaines. Après les fouilles, l’archéologue doit interpréter ses découvertes pour pouvoir en faire une publication et, si l’objet a été trouvé en dehors de son contexte archéologique, comme cela s’est souvent produit au cours du XIXe siècle, l’archéologue doit mener une étude qui lui permettra de développer des hypothèses. Le bédéiste, quant à lui, se sert aussi bien de données réelles qu’imaginaires, car contrairement à l’archéologue, il peut s’intéresser à des sites historiques, les reproduire ou bien en inventer de nouveaux, « innover » sur les fondements historiques des recherches scientifiques. C’est ce que j’ai aimé dans la dernière séquence, « Quand la bande dessinée imagine », où l’on y confronte notamment ce célèbre tableau de Hubert Robert, Vue imaginaire de la Grande galerie en ruines, (1796) avec une planche de Nicolas de Crécy tirée de sa BD intitulée Période glaciaire, (Futuropolis et Musée du Louvre, 2005) comme le clou du spectacle. L’un imagine le Louvre de la fin du XVIIIe siècle en ruines, évoquant son ancienne fonction de musée où un copieur tente encore  d’apprendre des œuvres du passé et où d’autres tentent de se réchauffer autour d’un braséro. Tandis que le second imagine un Palais du Louvre plus proche du XXIe siècle, enseveli sous des mètres de neige, où des aventuriers incultes malgré eux tentent de sonder ces siècles de passé (tout en pensant qu’il s’agit d’une seule et même civilisation à un temps donné) avant qu’ils ne disparaissent totalement.

             Si vous êtes encore mitigés à l’idée d’aller voir cette exposition, vous serez entièrement convaincus par le coin lecture de la Petite Galerie, installé au milieu de la dernière salle, qui permet à qui veut de se servir dans les bandes dessinées installées dans une petite étagère entièrement à la disposition des visiteurs. Vous y trouverez la plupart des BD évoquées le long du parcours, ainsi que d’autres, et vous aurez la joie d’admirer les sourire et les visages joyeux de tout âges, que tous ces gens qui se plongent dans une lecture passionnante en plein musée arborent, tout en oubliant qu’il y a un crâne exposé dans la vitrine d’en face.

Lise Thiérion

Illu Archéo BD 2.jpgLa Bande dessinée fait son entrée au musée

(NB Les BD citées ne sont pas toutes présentées dans l’exposition).

Une fois cette balade dans la Petite Galerie bien en tête, attardons-nous davantage dans ce coin bibliothèque et même plus particulièrement sur la rencontre (pas si nouvelle qu’on pourrait le penser) entre les trois premiers arts (pour ceux qui ne connaissent pas bien la classification : architecture, sculpture et arts visuels) et le neuvième, la bande dessinée.

Cette association quand on y pense paraît bien naturelle. Associer les arts anciens et poussiéreux des musées à celui nettement plus actuel et accessible de la Bande dessinée ouvre une nouvelle palette de possibilités. Bien sûr nombre d’entre nous pourront crier à l’irréalisme constant qu’on peut voir dans une grande partie de ces ouvrages. Mais soyons indulgent et penchons-nous sur la qualité ou non de ces histoires dont certaines sont mises à l’honneur au Louvre cette année.

           L’histoire d’amour entre le Louvre et la BD remonte à quelques années déjà. Depuis 2006, le musée s’est associé avec la maison d’édition Futuropolis pour donner chaque année carte blanche à un auteur de BD (bédéiste pour les intimes) afin qu’il produise un ouvrage en rapport avec le Louvre. De grands noms y ont participé : on peut notamment citer feu Jirô Taniguchi, grand maître du manga qui a réalisé Les Gardiens du Louvre (ed. Futuropolis) en 2014. Ce genre de partenariat n’est pas uniquement propre au musée du Louvre puisque le musée d’Orsay possède aussi sa collection avec Futuropolis (n’ayant pour l’instant que deux ouvrages à son catalogue), dont le fabuleux et irrésistible Moderne Olympia (ed. Futuropolis, 2014) de Catherine Meurisse qui raconte les déboires de l’actrice Olympia dans l’industrie d’Orsay n’ayant que des rôles X sur son CV et dont sa principale rivale n’est autre que Vénus, star du tableau de Cabanel.

           La Bande dessinée réinvente l’art et les musées pour montrer un aspect différent de ce qu’on peut expérimenter lorsqu’on est simple visiteur.

           Dans un premier temps elle sert à raconter les histoires perdues de tous ces objets qui restent inertes dans les salles. Évidemment, quelques périodes semblent plus propices à la réécriture que d’autres. C’est la raison pour laquelle on a de nombreuses histoires qui prennent place au temps des Pharaons comme Papyrus (ed. Dupuis, depuis 1974, 35 tomes) de Lucien de Gieter qui raconte les aventures du héros éponyme, protecteur et ami de la fille du Pharaon. L’occasion de représenter énormément de statues, temples et tombeaux dans un univers rempli de hiéroglyphes. Mais l’Égypte ancienne n’est pas la seule époque privilégiée : l’Antiquité romaine connaît également son heure de gloire avec Alix (ed. Casterman, depuis 1965, 37 tomes) de Jacques Martin, citoyen romain et aventurier au service de César. N’oublions pas non plus dans Astérix (grands absents de l’exposition par ailleurs), les irréductibles Gaulois qui font trembler ce même César. Plus rares existent aussi des ouvrages qui tentent de remonter encore plus loin dans le temps comme l’iconique Rahan (ed. Hachettes, depuis 1969) de Roger Lécureux et André Chéret ou plus récent, Silex and the city, (ed. Dargaud, depuis 2009, 7 tomes) de Jul qui réécrit la Préhistoire avec humour et anachronismes, tout en s’inspirant d’objets tels que les Vénus sculptées. Ce qui explique probablement la présence d’une certaine Diane de Brassempouy, top modèle, dont la ressemblance est assez frappante avec la dame du même nom.

           Dans une autre optique, la Bande dessinée s’empare parfois du musée comme un lieu de décor pour ses histoires farfelues. C’est notamment le cas pour Les Chats du Louvre (ed. Futuropolis, 2017) de Taiyô Matsumoto où le Louvre serait peuplé par des chats depuis des siècles. Plus réaliste (quoique), Bastien Vivès nous plonge dans le casse du siècle avec La Grande Odalisque, (ed. Dupuis, 2012, 2 tomes) récit dans lequel il met en scène trois jeune femmes décidant de braquer le Louvre (mais aussi le musée d’Orsay et d’autres encore). Ce qui donne lieu à des scènes fascinantes, notamment une hallucinante cascade à moto sur la pyramide du Louvre. Le Musée du Louvre en lui-même n’est pas la seule source d’intérêt, ses visiteurs y participent également. Ainsi dans L’île-Louvre (ed. Futuropolis, 2015) de Florent Chavouet, les visiteurs sont les personnages : leurs commentaires, leurs questionnement et leur comportement est ce qui est le plus savoureusement représenté, pour le plus grand plaisir du lecteur.

           Enfin, l’art, source perpétuelle d’imagination, permet par lui-même de proposer de nouvelles histoires. Ainsi dans Le Cimetière des Cathédrales, (ed. Lombard, 1988) de la série Rork d’Andréas, le héros part à la recherche en Amazonie d’un certain cimetière au fin fond de la forêt qui accueillerait des centaines de vieilles cathédrales envahies par la nature, de quoi faire frissonner un médiéviste. À l’opposé de cette idée de faire revenir le passé, Période Glaciaire (ed. Futuropolis, 2006) de Nicolas de Crécy nous amène dans un futur où des archéologues retrouvent le Louvre sous les glaces et interprètent ce qu’ils y découvrent (un bonnet de l’OM par exemple, marque d’appartenance suprême). Les objets y prennent vie également, appelant leurs redécouvreurs à l’aide. Le Louvre, déjà un lieu d’histoire en lui-même, devenu de nos jours un lieu d’exposition de découvertes, redevient dans ce futur un objet d’étude avec tout ce qu’il renferme dans ses salles enfouies. Les découvertes cherchent perpétuellement à être redécouvertes.

           La Bande dessinée s’empare donc de ce domaine monstre qu’est l’histoire de l’art, la remodèle, se l’approprie et en renvoie une image différente, réinventée. Cette association est peut-être ce qui pourrait permettre aux musées d’atteindre des publics qu’ils n’atteignent pas habituellement, mais cela reste encore à voir.

Salomé Moulain